Depuis le parking Ecuyer (arrière de la place de la Monnaie). Vers 1980 par © Dada

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 Rue de la Braie
  La légende

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Description (historique/actualité/....) :

Mais selon, Jacques Albin Simon Collin de Blancy ce nom lui viendrait d'une légende (Chronique des rues de Bruxelles - 1834 - tome 2 - p 139 - adaptation).

«Par une belle matinée du mois de mai, de l'année 1670, Nicolas Peers, de Gembloux, venait à pied à Bruxelles, accompagné de son ami Jean Tielman, coutelier de Namur.
Peers avait un beau caniche, appelé Moustache, qui semblait partager tous ses mouvements et avait l'air très intelligent. Aussi son maître raconta tout ce que son petit compagnon savait faire.
Tielman lui raconta à son tour d'autres histoires merveilleuses de chiens.
« Rien de tout cela n'égale ce que Moustache sait faire, dit Nicolas. »
Et comme le coutelier en doutait : « Si vous voulez, reprit Nicolas, parions un bon dîner que nous prendrons à Bruxelles. Je vais jeter au pied de cet arbre une pièce d'argent à laquelle vous ferez une marque. Dans trois heures nous serons à Wavre. Après que nous nous y serons reposés, j'enverrai de là mon chien à la recherche de cette demi-couronne. Nous poursuivrons notre route et si Moustache ne nous rapporte pas la pièce à Bruxelles, dans notre auberge, je vous offre le dîner.
Cette proposition sembla si curieuse à Jean qu'il l'accepta bien volontiers. Il prit la demi-couronne, la marqua de trois croix avec la pointe de son couteau et la remit à Nicolas qui la jeta dans le gazon au pied d'un gros chêne qui bordait la route.
Le chien était en avant.
Les deux amis poursuivirent leur chemin, Jean se réjouissant déjà aux dépens de son compagnon et Nicolas ne doutant pas de la réussite de Moustache.

Ils arrivèrent à Wavre, y dinèrent. Puis Nicolas dit à son chien : « J'ai laissé en route une demi-couronne comme celle-ci (il lui montra une pièce d'argent), tu vas retourner sur tes pas et me la rapporter. »
Du doigt, il indiqua la route, le chien parut comprendre et reprit le chemin de Gembloux pendant que les deux amis continuaient vers Bruxelles.
Arrivés à la chute du jour, ils logèrent dans une auberge qui se trouvait au bout de la rue de la Drèche, du côté du couvent de Jéricho qui a fait place au Nouveau Marché aux Grains.

Ne voyant pas Moustache revenir, Jean pensait déjà avoir gagné le pari mais Nicolas, tranquille, lui demanda de faire preuve de patience.
Vers minuit, ils allèrent se coucher.
Nicolas, même s'il ne doutait pas de l'habileté de son chien, commençait à devenir inquiet.
Jean triomphait : « Ah ! Vous croyez vraiment que votre chien sera retourné à trois lieues de Wavre pour rechercher une pièce d'argent dans un lieu qu'il n' a pas remarqué, puis qu'il reviendra à Bruxelles, qu'il traversera le ville et trouvera cette auberge ? Je vous ai laissé faire, Nicolas, mais j'étais sûr de gagner le pari. Pourtant ne vous inquiétez pour Moustache ; il aura regagné Gembloux où il est né et vous y attends déjà. J'espère que votre femme ne s'inquiètera pas de le voir revenir sans vous. »
Comme Nicolas ne répondait rien, Jean continua de se féliciter tout bas ; et les deux amis s'endormirent.
(Au même moment, un Liégeois, accompagné d'un chien et venu faire des tabatières à Bruxelles, alla loger dans une petite auberge fréquentée par les ouvriers dans leurs voyages, et qui se trouvait à l'autre bout de la rue de la Drèche, du côté du Vieux Marché aux Grains.)

Le lendemain matin, alors qu'ils déjeunaient en chambre, Jean et Nicolas entendirent un grand bruit venant de la rue.
Nicolas alla à la fenêtre et aperçut un chien poursuivi par des gamins. « Je crois que c'est Moustache, s'écria-t-il »
A peine dit, le chien entra dans leur chambre, portant à la gueule une culotte qu'il déposa sur le plancher.
Jean, qui ne comprenait rien à ce qui se passait, se mit à rire : « S'il n'a pas trouvé la pièce d'argent, il rapporte au moins une culotte. Mais la pièce valait mieux. »
« Vous ne rirez pas tout seul, répliqua Nicolas, en secouant la culotte. Il en tomba plusieurs pièces d'argent et de petite monnaie. La pièce marquée de trois croix par Jean roula sur le plancher. Le chien la saisit et la rapporta à son maître.
Jean se reconnut battu et pendant qu'il félicitait Moustache, de nouvelles clameurs parvinrent de la rue.

C'était le Liégeois qui venait récupérer sa culotte et son chien.
Nicolas lui dit qu'il s'agissait de Moustache.

Alors le Liégeois raconta son voyage.

La veille, vers midi, il s'arrêta sur la route et dîna au pied du vieux chêne où Nicolas avait jeté la pièce d'argent. Comme il s'apprêtait à repartir, il aperçut à ses pieds quelque chose qui brillait dans le gazon. C'était la demi-couronne de Nicolas. - C'est une bénédiction, dit-il, j'ai de quoi me régaler deux jours dans Bruxelles. -
Et il mit la pièce d'argent dans sa culotte.
Comme il reprenait la route, il vit Moustache qui le flairait d'un certain air qu'on pouvait prendre pour de la bienveillance.
« Un superbe chien et je ne vois pas de maître dans les environs. » Il caressa le chien et poursuivit sa route, enchanté de voir que le caniche le suivait.
Il traversa Wavre, toujours suivi par Moustache, qu'il caressait de temps en temps, et qui se laissait faire.
En se déshabillant, il mit sa culotte sur un vieux fauteuil. Aussitôt Moustache sauta dessus, s'y installa à son aise et ne tarda pas à s'y endormir.
Il s'endormit à son tour, content de voir que le chien gardait sa fortune.
Mais au petit matin, Moustache s'empara de sa culotte et fila à l'autre bout de la rue pour retrouver son maître.

Tout s'expliqua enfin. Jean paya le dîner, auquel le liégeois fut admis, et le caniche amplement fêté.

Depuis lors, la rue de la Drèche s'est appelée rue de la Braie (ou Braguette ou Culotte). On eût aussi bien fait de l'appeler rue du Chien.